2008 - [Citroen] GT by citroen (Paris)

Benoua a écrit:Comment celà ce fait que cette GT soit dans Grand Turismo 5 Prologue et que personne n'est pensé faire de photo avant du jeu ? Est-ce que quelqun peut m'éclairer si je me trompe en un point ?

GTby Citroën, l'exigeant retour à la réalité
Jacques Chevalier

Faire rouler une voiture de salon est une pure folie mais Citroën, qui aime les défis, l'a fait. Pour entretenir le rêve, il faudrait cependant beaucoup de développement encore. Inutile pour un pur exercice de style.

Elle a fait tourner les têtes au Mondial de l'automobile à Paris avec des lignes suggérant des performances hors du commun. Le simple fait d'être là, à la Porte de Versailles, était déjà un exploit, car la GTby Citroën n'avait aucune existence huit mois auparavant, sauf dans la tête de son père, le designer japonais Takumi Yamamoto. Celui-ci, adepte des jeux de console, avait échafaudé un projet fou qui consistait à dessiner une Citroën d'exception pour la prochaine version du jeu culte Gran Turismo. Une voiture seulement accessible à ceux qui auraient passé les différents niveaux de difficulté du jeu.

L'idée s'était imposée avec évidence à la suite de conversations avec son camarade de promotion aux Beaux-Arts de Tokyo, entré lui chez… Polyphony (Sony). L'éditeur de Gran Turismo n'a pas été long à se laisser convaincre devant la qualité du dessin qui lui a été soumis. Mais il restait à en faire autant auprès de la direction de Citroën. Takumi, rentré à Paris avec ses esquisses, a filé dans le bureau de Jean-Pierre Ploué, le patron du design aux chevrons (il coiffe aujourd'hui aussi celui de Peugeot). Et Ploué s'est révélé encore plus audacieux que son designer : puisque cette voiture avait une existence virtuelle, il fallait, comme à ses adversaires du jeu, lui donner une réalité mécanique. Mais selon un processus inverse à celui habituellement suivi.

300 km dans les roues

C'est donc bien une voiture virtuelle, entièrement conçue pour un loisir sur ordinateur, qui a donné naissance à une GT (grand tourisme) réelle que chacun a pu admirer et toucher à la Porte de Versailles. Mais les hommes de Citroën, décidément sûrs d'eux, ont tout de suite voulu la faire rouler. Il n'a donc que brièvement été question d'une maquette et aussitôt s'est imposée l'idée, beaucoup plus ambitieuse, d'une voiture roulante. Et, selon le vœu de Takumi, totalement hors normes.

En débarquant sur le circuit de Mortefontaine (nord de Paris) mardi, le président de Polyphony Digital a pu mesurer à quel point les Français sont étonnants. Grand amateur de voitures de sport lui-même, il achète toutes les nouveautés en double. L'une reste en état sortie d'usine tandis que l'autre est aussitôt passée à la moulinette du tuning. La GT trônait bien sur le parking du circuit, prête à prendre la piste avec son pilote essayeur, Alain Veillet. Responsable du prototypage pour le studio français qui a construit à la main cette GT, il cherchait le président japonais, disparu depuis une dizaine de minutes. Kazanori réapparut, habillé de sa combinaison de pilote et de ses bottines de conduite, le casque sous le bras. Au grand effroi des pères de la GT, tout le monde compris qu'il entendait bien en prendre les commandes.

Ce qu'il fit après deux tours d'initiation. L'équipe Citroën retint son souffle le temps que l'inestimable prototype - modèle unique et sans aucune pièce de rechange - exécute tant bien que mal quelques tours et restitue un président ravi de sa prestation. «Nous en sommes encore au déverminage de cette voiture, dit Patrick Arnaud, ingénieur projet. Elle n'a pas 300 kilomètres dans les roues et nous avons surtout passé beaucoup de temps à régler les problèmes d'une voiture qui a été réalisée en dix mois. Alors, s'il était arrivé un souci quelconque…»

Les soucis sont plutôt pour nous le lendemain. À pied d'œuvre à l'heure convenue, nous étions bien décidés à en prendre les commandes malgré le refus poli de Citroën. Les plaques humides qui avaient succédé au verglas matinal n'en étaient pas la cause mais plutôt un fonctionnement très capricieux de la boîte de vitesse. Alain Veillet, qui a accompagné tout le développement de la voiture, bataille ferme au volant, surmonté de deux boutons, à gauche pour descendre les vitesses, à droite pour les monter. Mais, contre toute attente, l'embrayage n'est pas asservi et s'actionne toujours au moyen d'une pédale. Le problème est qu'Alain décompose soigneusement chaque rapport et que ce n'est pas toujours le bon qui s'engage.

Moteur classé top secret

Prudemment, il joue longuement de l'embrayage et vérifie au témoin lumineux que le rapport souhaité est bien rentré avant d'accélérer. « Nous avons un fournisseur pour la commande électrique et un autre pour la boîte à crabots, explique-t-il, et l'ensemble ne dialogue pas bien. Nous y avons travaillé mais le résultat n'est pas encore satisfaisant. » Au point parfois de descendre un rapport au lieu de le monter. De quoi rafraîchir l'enthousiasme le plus aveugle.

Du coup, le brave moteur classé top secret délivre un son assez commun. Les bruits de roulements de boîte rythment tout cela et font d'un coup comprendre pourquoi une voiture exige au moins quatre années avant d'arriver en concessions. La GT n'en est qu'à ses premiers tours de roues, avec un programme très chargé de mise au point qu'elle ne subira pas car elle reste un concept de salon qui roule, et pas plus. «Nous avons été approchés au Mondial par de nombreux candidats acheteurs et même des partenaires industriels prêts à produire la GT mais il n'en est évidemment pas question» s'amuse Patrick Arnaud. Pas question, car ce n'est pas le territoire d'expression de Citroën et que, hélas, la marque aux chevrons n'a pas d'ensemble mécanique à la hauteur d'une telle ambition.