2012 - [HongQi] H7 [C131]

La HongQi H7 est une voiture chinoise produite par le groupe FAW. Avant de venir à cette sympathique voiture, faisons un petit rappel sur ce qu'est la firme HongQi. Là-bas, HongQi (le "Drapeau Rouge" en Chinois), c'est la marque des voitures des membres officiels du Parti Communiste, l'équivalent moderne des ZIL et des Volga de l'ex-URSS. Autrefois, la HongQi, c'était ça : un dérivé de ZIL 117, elle-même lorgnant sans vergogne sur les Lincoln américaines.

Les premières HongQi datent de l'époque de Mao, qui voulait une "belle" voiture d'apparat. En 2009, pour célébrer les 60 ans de la Révolution Populaire, le conservatisme est de mise pour Hu Jintao qui fait la revue des troupes sur la place Tien-An-Men à bord du HongQi modernisée. La HongQi apparaît alors avec un physique librement inspiré des dernières Rolls-Royce, mais sa face avant ne trompe personne avec son kitsch ultra anachronique avec le reste de la voiture.

Sur le marché automobile chinois, HongQi n'a pas vraiment la cote. Les Chinois fortunés se rêvent en Occidentaux, et veulent avant tout conduire de grosses cylindrées venues d'Europe : Ferrari y réalise ses meilleures ventes, tout comme Porsche qui a pensé expressément pour eux une Panamera rallongée ; à un degré moindre, on sait que la Phaeton de Volkswagen ne doit son restylage qu'à l'engouement de son design fade auprès des clients de la bannière rouge (eh oui, quand on est membre d'un Parti issu de la Révolution Populaire, on se doit de rouler dans une voiture du "Peuple" !). Si les Rolls-Royce, Bentley, mais aussi ceux qu'on nomme "premium" (le trio BM-Audi-Mercos) réalisent de belles performances, régulièrement en croissance à deux chiffres, dans l'Empire du Milieu, il est une évidence : les HongQi ne plaisent pas à leur cible de marché. Pourtant, elles font tout pour imiter les codes du genre : design mastoc (voire plagié), ainsi que leur dernière production en atteste :

C'est d'ailleurs un fait propre à la Chine qui se révèle depuis quelques années : comme en Russie, les Chinois sont fiers de posséder des produits qui ne leur rappellent pas leur pays. Le made in China n'est pas en vogue en Chine car les productions étrangères sont synonymes de meilleure qualité. Le must ? Les Etats-Unis, ce qui explique en partie que GM soit leader des ventes automobiles sur le marché Chinois, malgré le soutien non-caché sur Parti pour les fabricants locaux (la loi de non-attribution de nouvelles joint-ventures depuis fevrier 2011).

Deux visions s'opposent : d'un côté, Pékin, qui veut que ses marques nationales profitent au maximum du dynamisme de l'économie ; de l'autre, les grandes fortunes du pays, qui font tout pour échapper à l'image de leur pays. Entre les deux, on trouve les membres du Parti Communiste : dans la capitale, ils sont dotés de HongQi ; en province, ils roulent selon leur idée. Et leur idée, bien souvent, c'est de rouler en Audi ou en Mercedes, surtout pas en HongQi. Or, depuis peu, les instances Chinoises décideront à leur place : ils roulent en HongQi. Une production de 30.000 modèles est prévue pour l'année prochaine, d'un modèle 100 % nouveau auquel ce sujet est consacré.

Design 100% nouveau pour la future HongQi, nom de code "C131", mais qui deviendra sur le marché la "H7". Les références assumées viennent maintenant d'un peu partout: optiques de Skoda Superb, calandre Maybach, cocotte (le mot "in" pour dire "bouchon de réservoir") qui rappelle la Peugeot 404 ; le profil est moins perceptible et moins connoté, mais se pare malgré tout du "Hoffmeister Knick", le fameux retour chromé du vitrage propre à BMW.

Forcément, c'est une berline trois volumes, car en Chine avoir un coffre est gage d'un statut plus élevé dans la société. La malle est bien intégrée et dessinée, et là encore les inspirations sont multiples, entre l'Infiniti M et la Mercedes Classe E. Pour autant, esthétiquement, cette berline n'a strictement rien à envier aux productions européennes. Cohérente, discrète mais néanmoins affichant une belle prestance, cette HongQi convient à sa mission, qui est de transporter des personnages de haut rang selon leur standing (si appréciables soient ces personnages...).

L'intérieur est l'épreuve de vérité. Audi notamment a fait de ses critères des références sur le marché du haut de gamme. HongQi joue dessus, qui sait peut-être au même niveau, mais avec un peu plus de kitsch : les placages en ronce de plastique rappellent les années 90. Cette place, qu'elle soit dévolue à un chauffeur ou à l'appartchik même, reste enviable : cuir, accoudoir, ordinateur de bord, boitoto, et un agréable contraste noir-beige, la HongQi sait recevoir.

Alors, cette HongQi réussira-t-elle à convaincre ses futures propriétaires ? En attendant la réponse à cette question, sûrement maladroitement retouchée par des experts de propagande qui n'hésiteront pas à vanter à l'excès une voiture au demeurant certainement recommandable, force est de constater qu'elle propose un agréable dessin et des prestations au niveau de la concurrence. Avec elle, les couleurs du "Drapeau Rouge" sont fièrement portées.

Sources :
> http://www.carnewschina.com/2012/02/23/hongqi-c131-hongqi-h7/
> http://www.carnewschina.com/2012/02/05/china-turns-to-domestic-brands-for-government-cars-audi-to-loose/
> http://www.lefigaro.fr/societes/2012/02/27/20005-20120227ARTFIG00462-ressuscitee-par-pekin-la-limousine-de-mao-menace-audi.php
(et un grand merci à Frederic E. pour ces liens)